vous voulez bien de nous, à côté de vous ? en se serrant un peu…
— Comment donc ?
Geneviève et Rita dégagèrent la moitié du banc.
— À tout à l’heure, dit Luc.
Il s’éloigna. Les spectateurs étaient maintenant plus nombreux. Tous les sièges se trouvaient occupés. Beaucoup d’hommes restaient debout ou s’asseyaient sur le sol.
Rita, d’un regard suprêmement intrigué, interrogeait Geneviève. Mais leurs deux voisines, qu’elles connaissaient, avaient engagé une conversation d’allure générale, à laquelle il fallait bien prendre part. Quitter la place, elles n’y pouvaient songer. La descendante des Ortofieri bouillait d’impatience. Qu’est-ce que Geneviève avait voulu lui faire entendre ? Pourquoi Geneviève lui avait-elle imposé silence ? Son calme était insupportable ! Comment faire, pour savoir, avant la fin de la partie ? Cette partie qu’il était nécessaire de suivre jusqu’au bout !
Geneviève, cependant, n’avait pas abandonné son ouvrage. Tout en parlant, tout en levant les yeux de temps en autre sur Luc et Simpson qui se démenaient dans leur cage, courant, bondissant et pirouettant, elle ne cessait guère de tirer l’aiguille. Toutefois :
— J’en ai assez, dit-elle inopinément.
Et elle ouvrit son immense sac pour y réintégrer le napperon.
— Tu ne me complimentes pas sur mon talent ! dit-elle.
C’est pourtant gentil. Comment trouves-tu mes fleurs ?
Elle tendait aux regards de Rita la toile ornée de corolles orange et de feuillages mauves.
— C’est tout à fait joli, reconnut Rita.
Mais elle n’en dit pas davantage, pétrifiée de ce qu’elle venait d’apercevoir.
À grands points, autour d’une fleur, Geneviève avait, en quelques aiguillées, tracé les sept lettres d’un nom : CHARLES.
Ce nom qui semblait de loin couronner la fleur merveille d’une arabesque capricieuse et purement décorative, éclatait pour Rita en jambages de soleil.