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le maître de la lumière

près de nos lecteurs de continuer à simplifier, — peut-être jusqu’à l’excès, — tout ce qui touche à la partie scientifique de cette histoire. Chaque chose à sa place. Il existe maints rapports, maints ouvrages techniques sur le sujet de la matière que Charles Christiani venait de découvrir — ou plutôt de redécouvrir — et qu’il baptisa « luminite ». Nous renvoyons à ces savants travaux les amateurs de détails et de précisions qui, du reste, pourront déjà se livrer à bien des rêveries fécondes en partant des données, fort élémentaire pourtant, que nous venons de leur fournir. Nous n’estimons pas, en ce qui nous concerne, devoir descendre plus avant aux profondeurs de la science. Car nous ne sommes qu’un scribe chargé de conter une histoire d’amour curieusement mouvementée, — et rien de plus. C’est déjà, en soi-même, une tâche assez belle et qui nous enchante.

Laissons donc de côté tout ce qui relève de la chimie et des mathématiques, sans compter le reste ; et même, si quelque lectrice a rechigné en lisant ce qui précède, demandons-lui tout simplement de retenir, pour le moment, que la luminite (ainsi Charles Christiani baptisât-il la substance rétrospective) est une chose qui produit le résultat suivant : la lumière cheminant dans cette matière à une vitesse extrêmement freinée, on voit, de part et d’autre des plaques de luminite, ce qui se trouvait là jadis. Et plus la plaque est épaisse, plus le passé qu’elle montre est lointain, sur une face comme sur une autre.

Cela posé, reprenons le fil des événements.

Le premier qui se présente à nous, pour être retracé, se passa le soir même.

Quand la nuit fut venue, Charles Christiani, qui n’avait pas, de la journée quitté sa chambre, vit pour la seconde fois l’ancêtre César pénétrer dans la petite chambre haute, comme si, au lieu d’être devant sa cheminée, Charles eût été là-haut, à regarder du dehors ce qui se passait au deuxième étage de la tour. Et, à ce propos, il se fit à lui-même une remarque assez plaisante : c’était que, même si la petite chambre haute se fût trouvée vide de tout mobilier en 1929, la vitre de