Page:Renard - Le Péril Bleu, 1911.djvu/169

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

xx

Démences



Le surlendemain, le docteur Monbardeau — dont la valeur médicale est justement réputée — certifia que la guérison de sa belle-sœur était une question de temps et de patience. Mme Monbardeau vint une fois de plus habiter Mirastel, en qualité de garde-malade ; et, bien que Mme Le Tellier se montrât sensitive à l’excès ; bien que la moindre surprise l’électrisât ; bien que cinq minutes ne pussent s’écouler sans qu’elle fît le geste-tic de repousser quelqu’un, ou sans qu’elle parlât du veau inexplicable, — une amélioration faible mais évidente justifia le pronostic du médecin.

C’était une chance inouïe ; la commotion cérébrale avait été de la dernière violence. On en posséda la preuve supplémentaire quand, les cheveux de la malade ayant poussé quelque peu, on s’aperçut qu’ils poussaient blancs. La chevelure tout entière devait avoir blanchi, mais jusqu’à présent la teinture avait empêché qu’on le remarquât.

Pour accélérer la convalescence de l’affligée, il aurait fallu qu’elle prît l’air, aussi. Mais, en admettant qu’elle s’y fût prêtée, nul ne l’aurait permis durant ces jours détestables. Car depuis l’enlèvement de Maxime, perpétré avec une audace, un cynisme et une prestesse non encore déployés, les Bugistes ne s’aventuraient plus à ciel ouvert qu’avec d’infinies précautions. M. Le Tellier lui-même s’opposait à la sortie des siens. Il subissait alors une seconde dépression morale et s’abandonnait à