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le carnaval du mystère

ils ont tant espéré, si vous saviez ! La commutation de peine… l’avocat leur avait dit qu’il l’obtiendrait, malgré l’évidence du crime… Ah ! ce crime ! ce crime qu’ils ne peuvent pas arriver à comprendre, eux si honnêtes, si respectueux de l’ordre et des lois ! Eux qui n’ont jamais failli ! Eux dont la seule faute est d’avoir donné au pays un de ces citoyens bien plantés, un de ces soldats sans peur, qu’il réclame à cor et à cri, n’est-ce pas ?… Non, c’est trop dur !… Mais quoi ! ils ont toujours payé leurs dettes ! Ils paieront encore, cette fois-ci… Seulement, cette fois-ci, oui, c’est dur.

La nuit vient. Ils sont assis dans la pénombre, côte à côte. Ils n’osent pas se parler, ni même se regarder.

Pourtant :

— Et dire qu’il se repent ! chevrote le vieux. Oui, qu’il se repent ! Je le connais.

— C’est ce qu’il y a d’épouvantable aujourd’hui. Moi, pour qu’il n’ait pas de regret, vois-tu, je donnerais… tout ! Je donnerais tout !

— J’aurais mieux fait d’aller à Béthune, reprend-il.

Mais, laissant tomber sa tête lourde, il ajoute seulement, car il sait bien que la torture est au-dessus de ses forces :

— J’aurais dû.

Ce qu’il aurait vu, s’il était allé à Béthune,