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alcool

Penser qu’il lui avait serré la main au seuil de sa chambre, et que, de l’autre main, dans sa poche, il couvait son couteau à cran d’arrêt !

À ce souvenir, il s’indigna, l’œil obscur.

— Je ne suis qu’un salaud ! Un salaud ! Un salaud !

Et il se revoyait, rentrant ici même avec un mauvais sourire de lâche, écoutant de loin le bruit que faisait Moussy en se déshabillant et en trébuchant… Il n’en finissait pas, ce Moussy… Alors, Paillot s’était étendu sur son lit, pour attendre… Et le sommeil était venu, profond, peuplé de rêves laborieux dont il ne se souvenait pas.

— Il y a une Providence, bon Dieu de sort ! Pour sûr qu’il y a une Providence !

Des larmes lui jaillirent. Il s’attendrit. Un reste d’ébriété, joint à la dépression des lende­mains de soûlerie, faisait naître en lui un repentir expansif, l’envie de se racheter, un désir intense de pardon et aussi une vague reconnaissance à l’égard de la Destinée.

Il verrait Moussy tout à l’heure. Il lui tendrait la main. Il l’embraserait, bon sang ! Oui, il l’embrasserait, en pleurant ! Et tout ça, tout ça, il le lui dirait comme à confesse, en jurant de ne plus boire, jamais, jamais, jamais !

Et sur-le-champ il fut pris d’une fiévreuse impatience d’apercevoir les premières lueurs du jour, pour aller trouver Moussy et lui faire