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Page:Renard - Le carnaval du mystère, 1929.djvu/168

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le carnaval du mystère

fermage. Mon bail finissait le 24 juin ; alors, pour qu’on ne m’augmente pas, pour écarter les concurrents, j’ai fait ça !… Oui, je l’avoue, c’est moi qui ai poussé les journalistes dans l’étang. Oh ! ça n’était pas bien dangereux ! Pendant qu’ils barbotaient, je me débarrassais rapidement de mon drap, je faisais semblant d’accourir ; ma femme et ma mère se précipi­taient… Un bain froid, et tout finissait par une bonne tasse de vin chaud, dans un lit soi­gneusement bassiné… Voilà comment les jour­nalistes ont été punis de leur curiosité… Mais l’autre, monsieur, le troisième !…

» Imaginez-vous un type d’une cinquantaine d’années, pâle, avec des yeux bizarres, l’air exalté. Bien mis, quoique modestement… Il est arrivé chez nous hier au soir. Il m’a demandé :

» — C’est bien ici la ferme de Baslieu ?

» — Oui.

» — Et alors, vous êtes M. Dorignot ?… J’ai lu dans les journaux le récit de ce qui se passe chez vous. Voulez-vous me donner l’hos­pitalité cette nuit ?… Je paierai.

» Ça ne m’allait guère, monsieur le procureur. Je commençais à en avoir assez de jouer la comédie, à présent que mon fermage était renouvelé avec une sérieuse diminution. Mais que faire ? Je dis, en bougonnant :

» — Comme vous voudrez.

» Et l’homme resta. — Nous nous demandions