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Page:Renard - Le carnaval du mystère, 1929.djvu/193

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l’épouvantail

aller, mes agneaux. Je n’y pensais plus, moi ! Votre maman va s’inquiéter… Vous arriverez tout juste avant la nuit… À la soupe, vous autres ! Le père s’impa­tiente.

Les deux petits, rouges encore de leurs ébats, s’échappèrent en courant.

— Dépêchons-nous ! dit Nane.

Ils se reprirent la main, et marchèrent à la hâte.

— On s’a bien amusé, dit Nane.

Pierrot ne répondit pas.

Le soir s’assombrissait. Dans le silence gran­dissant, montaient des bruits nouveaux : grésillement de l’herbe, flûte des crapauds, hululement de la chouette. Et déjà, sous les feuillages, au creux du ravin, des morceaux de nuit étaient installés, en avance.

— Dis, reprit Nane, on s’a bien amusé… Dis !

Mais, tout à coup, elle aussi pensa ce que son frère pensait. Et son cœur fut glacé.

Ils allaient sans rien dire, écoutant se taire le crépuscule, ouvrant de grands yeux, épou­vantés soudain de suivre cette sente étroite­, encaissée, que des ténèbres louches emplissaient