Page:Renard - Le carnaval du mystère, 1929.djvu/201

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
193
plus haut que jamais

Avant le départ, Schwartz le cinématographia longuement, bouclé dans son baquet. Vigneux poussa la complaisance jusqu’à faire jouer, devant l’objectif, toutes ses commandes, pantomime à laquelle il s’était toujours refusé.

Enfin, l’hélice lancée tourbillonna, vrombit… Le moteur ronflait à merveille.

L’aéroplane s’enleva contre un vent du nord, dans un ciel pur comme le vide.

Nous regardions tous l’appareil, cabré, décrire une vaste spirale et s’élever comme aux flancs d’une invisible tour de Babel, — rapide, vent arrière, — laborieux, vent debout. Je l’obser­vais dans ma jumelle. Tout allait aussi bien que possible : l’obliquité de l’ascension ne variait pas, le bruit me plaisait, et les ailes semblaient résister puissamment chaque fois que Vigneux faisait face au courant du nord. Il y avait là quelques secondes de bourlingage ; l’aile gauche en l’air, le planeur fatiguait, déporté vers l’est. Au quatrième tour, la lutte de l’homme avec la rafale s’étant prolongée sur ce point, j’en­tendis chuchoter : « Ah ! mon Dieu ! » et je vis Schwartz, très pâle, qui suivait la joute. Il s’empressa de me parler ; on aurait dit que cela le soulageait :

— Vous me croirez si vous voulez, mais c’est la première fois que je tremble en voyant un aéroplane… Ah ! enfin, voilà ce maudit tournant qui est passé !… Vous êtes tranquille,