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Page:Renard - Le carnaval du mystère, 1929.djvu/214

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le carnaval du mystère

— Je l’espère bien ! s’écria-t-il d’une voix rude.

Cette réponse eut le don de m’interloquer. Je considérai mon hôte avec stupéfaction.

— Il faut qu’il expie ! ajouta-t-il.

La bestiole continuait sans relâche à faire frémir ses larges ailes. Ses pattes touchaient le liège. Elle virait sur elle-même autour de l’axe qui l’immobilisait, s’obstinant à vouloir s’envoler. Elle avait la taille d’une petite chauve-souris. La tête de mort se dessinait très nettement sur son dos velu, comme l’em­blème macabre du corsaire, le signe de son rôle destructeur. Dans l’ombre, ses deux gros yeux luisaient, tels que deux pierres opalescentes aux reflets chatoyants.

— Mange et repose-toi, me dit maître Jacobus.

Mais je ne pouvais me détacher d’un spec­tacle que ma sensibilité me rendait presque effroyable. Je n’avais jamais vu de papillon aussi grand que celui-là. Sa parure mortuaire m’impressionnait. Fléau, bête de nuit, il me faisait un peu peur, et cependant son supplice me révoltait. Je ne comprenais pas que maître Jacobus ne l’eût pas tué tout de suite, sans lui infliger le long martyre qu’il appelait une expiation.

— Il s’introduit dans les ruches, fit-il âprement. Il s’empare de la reine des abeilles, la