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sonia maniewska

Cette Sonia ! Je vais lui apprendre aujourd’hui à respecter ses devoirs de maîtresse de maison… Oh ! Oh ! Je connais les moyens de faire peur aux gens, moi ! Nous allons bien rire, voyez-vous !

Nous riions déjà. Trop haut. Et les tziganes, silencieux, debout, les yeux fixés sur le maître, avaient des faces craintives ou servilement égayées.

— Dissimulez la table, ordonna Vassili. Vous, mes amis, passez derrière les paravents, avec les tziganes. Faites des trous avec des épingles, pour regarder à travers l’étoffe… Ah ! naturellement, après cela, beaucoup de gaieté, hein ? La pauvrette en aura besoin ! C’est amusant, c’est amusant !

Je n’oublierai pas son visage pâle, au rictus méchant, ni ses prunelles allumées d’un feu concupiscent, ni ses mains fébriles, ni toute cette impatience qui l’agitait, à la pensée de mêler un peu de sauvagerie à son amour.

Nous ne savions quel jeu sanguinaire il avait imaginé. Groupés à l’abri des paravents, chacun de nous gardait pour soi ses sentiments.

Nathalia, pourtant, me dit tout bas :

— J’ai peur.

Mais je lui jetai un regard si autoritaire qu’elle se tut.

En apparence, Vassili était seul dans la rotonde. Il vérifia que la table, poussée dans une