Page:Renard - Sourires pincés, 1890.djvu/62

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habile et audacieuse, sortit, passa dans la cuisine, appela Marie et laissa son Henriette en tête à tête avec M. Gaillardon. Celui-ci, tout d’abord, attendit leur retour. Comme elles tardaient, il chercha à s’occuper et débourra soigneusement sa pipe, en lui enfonçant dans le tuyau, jusqu’à la gorge, une aiguille à tricoter.

Henriette, ses fortes mains étalées sur ses genoux, gardait son immobilité, dans un coin, la tête penchée, le souffle doux, rouge autant que l’occasion l’exigeait. M. Gaillardon se leva et se promena d’une fenêtre à l’autre. Il s’aperçut que le temps allait se gâter sûrement, et, comme il voulait être de retour chez lui avant l’orage, il appela ces dames pour leur dire au revoir.

Dès qu’il fut parti, Mme Repin demanda :

— « Qu’est-ce qu’il t’a dit, mon Henriette ? » —

— « Il m’a rien dit. » —

C’était trop fort. Une semblable indifférence stupéfia M. Repin même. Il fut d’avis qu’il fallait renouveler l’essai.

Donc, au premier déjeuner, le café pris d’une manière hâtive, M. Repin, sous le prétexte d’une course pressée, se leva de table. Mme Repin et Mlle Marie disparurent vite dans la cuisine. Mais