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LES OISEAUX DE PARADIS


Eux ils voient, dans leur vol sublime,
Ramper le monde, au loin, bien bas.
A peine effleurent-ils la cime
Des grands figuiers, quand ils sont las,
Et sur les vagues de leurs ailes
Ondulant comme des nacelles,
Le corps rayonnant d’étincelles,
Ils montent où l’on ne sait pas.

Oh ! s’il est jamais, en ce monde,
Rien tombé du jardin des cieux,
C’est la légion vagabonde
De ces oiseaux au vol soyeux,
De ces mystiques rêveries
Qui flottent dans les pierreries
Et qui ne veulent pour prairies
Que l’azur où l’on met les dieux.

Mais voici qu’ils se sont arrêtés sur un faîte,
Et qu’on entend soudain frissonner la tempête.
A gagner les hauteurs où le ciel est serein,
Leur vol va s’épuisant ; la rafale sans frein
Les prend, et vers le sol les pousse avec la nue.
Ils tombent, tout meurtris, sur la terre inconnue.