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Zine regarda et reconnut celui dont le regard appuyé l’avait tout à l’heure émue, elle en eut la parole coupée, elle si vive à la riposte coutumièrement.

L’autre la prit par le bras, avec une sorte de lenteur hardie et délicate.

— Venez, charmante amie, et dites-moi votre nom.

Elle répondit presque involontairement :

— Zine !

— C’est joli comme vous, preste, hardi, piquant et capricieux. Zine, vous venez dîner avec moi ?

Elle voulut protester, cherchant quelque méchanceté ragotique à décocher brutalement. Mais l’œil sombre de son nouveau compagnon pesa sur le sien. Il était triste et froid, et la bouche ironique se tordait comme pour mépriser.

Alors Zine abandonna son bras et murmura avec un soupir :

— Oui, mais je suis lasse.

— Nous allons chez Poccardi, répondit l’autre, et c’est à deux pas.

Dans une des petites salles du haut, à côté de l’Opéra-Comique, ils dînèrent. Le vin d’Italie, captieux et capiteux, exaltait la joie et la confiance de Zine. Lorsqu’ils sortirent, elle avait tout raconté à son nouvel ami. Lui, approuvait, attentif et narquois.

— Je vais, petite Zine, dit-il enfin, lorsqu’ils se retrouvèrent sur le boulevard déjà désert, te mener chez moi. Ne crains rien. Je te donnerai quelque argent et te trouverai une chambre ensuite, tu feras à ta guise pour utiliser tout cela.

— Vous allez rester mon ami ? dit la fillette émerveillée.

— Oui, ton ami !…

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Ils furent dans un vaste appartement, rempli de bibelots et de tableaux, où Zine se connut un peu gênée et parla bas. Il la mena enfin dans sa chambre.