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L’autre fut foudroyé par cette innocence vicieuse, qui prenait à la lettre ce qui doit s’accommoder selon les circonstances, à savoir la logique, la justice et la vérité. Il rétorqua :

— Ah ! quel dommage que tu n’aies pas reçu une bonne éducation. Je crains bien de ne rien faire de toi.

— Alors, demanda l’enfant avec ingénuité, une bonne éducation, ça consiste à sembler écouter les vieux types même quand ils vous bourrent le mou ?

L’argot offensa le digne macrobite. Il riposta :

— La bonne éducation, c’est d’avoir confiance dans les personnes âgées qui ne peuvent donner que de bons conseils.

— Par exemple, dit Zine, de me mettre nue, comme vous allez me le demander tout à l’heure, et de vous permettre de risquer deux ans de prison…

— Hein… Hein ?… grogna le vieux.

— Dame, croyez-vous que je ne le sache pas. Je suis tout ce qu’il y a de plus mineure, et la loi vous défend de me toucher, tout au moins là où ça vous tente le plus de le faire…

— La loi… La loi… dit le personnage avec importance, je sais ce que c’est, je la fais.

— Tiens, dit Zine, vous êtes peut-être de ces types qui ont décidé de punir ceux qui vont faire l’amour au Bois de Boulogne pendant la belle saison.

— Oui, dit majestueusement l’autre. C’est honteux de s’étaler comme ça.

— S’étaler, ricana Zine, à une heure du matin dans une forêt, vous appelez ça s’étaler. On s’étale tout de même moins que dans une chambre d’hôtel, où tous les locataires voisins, avec une vrille, ont percé un trou dans les murs et voient ce qui se passe quand vous faites… ça.

— Ma petite, ronchonna le parlementaire — puisqu’il avait dit faire les lois — je suis pour la morale et j’abomine le libertinage, l’obscurité et les enfants trop impudiques qui parlent de tout sans rien connaître.

— Si c’est pour moi, la fin de votre phrase, s’exclama