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II

L’Atelier

Zine, descendant l’escalier assise sur la rampe, trouva durant deux étages que c’était charmant. Au troisième, elle sut que cela lui échauffait un rien les paumes. Au quatrième, elle sentit qu’à travers la mince jupette, cette rampe lui brûlait singulièrement les cuisses. Il était trop tard pour s’arrêter, et d’ailleurs, elle était partie à une vitesse si foudroyante que cela devenait sans doute impossible. De plus, comme elle relâchait sa double étreinte des mains et des jambes, par l’instinct qui porte à fuir une sensation déplaisante, et le frottement l’était à un haut degré, elle se fût sans doute cassé les reins au rez-de-chaussée si un homme ne s’était trouvé au second étage pour arrêter cette chute.

Le survenant, un aimable journaliste, haï d’ailleurs de la mère Taupy, qui lui attribuait tous les défauts, montait chez lui au troisième en chantonnant quand il vit débouler la fillette jupes levées dans un glissement vertigineux.

Il s’arc-bouta et, au passage, arracha Zine de sa monture. L’élan faillit l’entraîner à son tour, mais il s’accrocha à un angle de mur en disant :

— Hé bé ! dites donc, vous jouez à vous casser la gueule, ma petite ?

Zine, ahurie, s’abandonnait :

— Alors quoi, vous êtes poursuivie par un tigre. Qu’est-ce que ça veut dire cette descente-là ?

— Ah ! dit enfin Zine, se reprenant, c’est pour échapper à maman.

Et, confirmant ses dires, on entendit venir des sommets de la maison des injures variées et grasses.