Page:Renouvier - Les Dilemmes de la métaphysique pure, 1901.djvu/177

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qui n’ont rien de commun avec le transformisme, méthode antique (XXIII) rajeunie par H. Spencer grâce à l’interprétation vicieuse de la loi générale de la physique mécanique, et employée, comme jadis par Héraclite d’Éphèse, à réduire à l’unité de substance et de développement toutes les formes de l’être.

Le déterminisme absolu est la conception apriorique dont procède essentiellement ce vaste système, parce que l’auteur en a conçu le plan comme une histoire de l’expérience universelle des êtres, formés et constitués par les modifications du sujet externe, la Force-Matière, instruits par la nature et la succession de ses phénomènes, et rattachés généalogiquement les uns aux autres pour s’en transmettre les résultats accumulés. Il a pour cela supposé, pour chaque moment de transition d’une forme à une autre, d’une espèce à une autre, dans la nature, et d’un mode d’organisation et d’intelligence à un autre, dans le cerveau et dans l’esprit, une parfaite continuité, indispensable à l’explication générale de l’évolution. Tout saut d’un état à un autre et toute production d’individualité réelle sont incompatibles avec le transformisme. Le transformisme demande que l’on regarde tous les changements et toutes les différences des êtres comme des résultantes obtenues par des gradations insensibles, et il multiplie les hypothèses autant qu’il est nécessaire pour expliquer les écarts observés et les lacunes, et substituer partout à l’apparence des espèces et des révolutions, la réalité supposée du mouvement continu de l’être universel.