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INTRODUCTION

pour le croire, sur les faits suivants, racontés dans Monsieur Nicolas.

En 1761, Restif, alors simple ouvrier typographe venait d’épouser, le 22 avril 1760, Agnès Lebègue. Il habitait un très modeste appartement dans la rue Saint-Jacques. Agnès Lebègue n’avait pas tardé à se lier avec des voisins, qui menaient une existence assez joyeuse, le marchand imagier et graveur, Chéreau, et sa femme, dont la boutique était située rue Saint-Séverin. À cause d’un procès avec son beau-père, Chéreau avait fermé momentanément sa boutique et logeait en garni rue Saint-Jacques, vis-à-vis l’appartement de Restif. La femme du marchand imagier était bossue, mais très jolie. Elle avait pour amant un aventurier, Lafray, et un personnage qui ne valait guère mieux, un nouveau converti, qui avait pris le nom de Johnson et s’appelait en réalité Cahuac, fréquentait leur maison. Ce ménage parisien était complété par « une jeune fille blonde, d’Anvers, nommée Lambertine, fille de chambre de la femme et maitresse du mari… riche en couleur et un peu sonneuse »[1], c’est-à-dire ayant des taches de son sur le visage.

Le jour des Rois, le 6 janvier 1762, les Chéreau invitèrent leur voisin à venir manger « un beau dinde » en compagnie de Johnson, Cahuac et Lambertine. «Je n’avais pas envie d’accepter, assure Restif, mais j’avais faim. » Il devait aussi avoir soif, car à la fin du repas, il pouvait à peine se tenir debout. Sous prétexte qu’il était gris et battrait sa femme pour se dégriser, Lambertine prit la peine de le conduire au logis, le déshabilla, le mit dans son lit et s’y mit également. « Telle fut, conclut le vertueux Restif, cette crapuleuse partie dont je partageai innocemment la turpitude. »

Quelque temps après, chez les Chéreau, Lambertine, seule

  1. Monsieur Nicolas, t. III, pp. 39, 41, 48.