Page:Reveille-matin des François, 1574.djvu/140

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
94
D I A L O G V EI.

quelque bonne vie & changement de mœurs que i’aye apperceu en mes proches voiſins qui en faiſoyent profeſsion, & ie laiſ‍ſe à part ceſ‍te barbare tuerie que l’Hiſ‍toriographe a recité) tout y eſ‍t tellement conduit, qu’il n’eſ‍t pas poſsible de voir vne plus grande maſ‍ſe de meſchãcetez, ny vn chaos plus horrible, ſoit que tu regardes la Iuſ‍tice, ou que tu contemples la Police, depuis vn bout iuſques à l’autre. Que dy-ie, ſi tu les regardes : tu aurois beau y regarder, tu ne les y ſcaurois voir : elles n’y font pas, pieç’a qu’elles s’en ſont allees : on ne les y trouue plus qu’en eſcrit, on n’y voit que leurs noms & leurs maſques. Quant au ſeruice de Dieu que nos peres nous auoyent apprins à bonne intention, nos Princes d’auiourd-huy, leurs courtiſans, & à leur imitation vne infinité d’autres gentils hommes & de bourgeois & marchands, ne s’en font que rire & moquer. Le ſoldat le deſpite & deteſ‍te : la cour pour le dire en vn mot à l’exemple du Roy, & la plus grande partie de France à l’exemple de la cour eſ‍t pleine de blaſphemes, d’atheiſme, & parmi eux l’epicureiſme, l’inceſ‍te, la ſodomie, & toute autre ſorte de lubricité, eſ‍t vulgaire & familiere. Tu as ouy combien de fois la foy publique (qui deuſ‍t eſ‍tre vn lien indiſ‍ſoluble pour entretenir la ſocieté humaine) y a eſ‍té violee, tellement qu’on ne ſcait plus à qui lon ſe doit fier. Nous penſions qu’apres tant d’Edic‍ts rompus, celuy de la pacification derniere, fait au mois d’Aouſ‍t en l’an 1570. ſeroit à la fin obſerué. Noſ‍tre poure France

commençoit d’auoir quelque relaſche à ſes miferes :

nous