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D I A L O G V EI I.

auant vers toy & en arriere qui reuienent ie n’en voy pas ſeulement vne.
L’hiſ‍t. Si feu monſieur l’Amiral euſ‍t ſceu ce conte & qu’il euſ‍t parlé en regnard, il nous en euſ‍t à tous mieux pris. Mais la brebis comme tu ſcay, ne ſcait rien faire que beeler, & ne ſcachant auec les loups hurler pour deſguiſer ſa voix, elle n’a garde d’eſchapper. Mais quant à ces autres Courtiſans : quel remede ?
Quand ces miſerables voyans reluire le threſor du tyran, qu’il tire de la ſueur du peuple, & de la deſpouille des bons, regardent tous eſ‍tonnez les rayons de ſa brauerie : & alléchez de ceſ‍te clarté s’approchent de luy, ſans regarder qu’ils ſe mettent dans la flamme qui ne peut faillir à les conſumer.
Ainſi le Satyre indiſcret voyant, comme diſent les fables anciennes, eſclairer le feu trouué par Promethee, le trouua ſi beau qu’il l’alla baiſer & s’y bruſler.
Àinſi le Papillon qui eſpere iouyr de quelque grand plaiſir ſe met au feu de la chandelle, qu’il voit eſ‍tre clair & luyſant, eſprouuant en iceluy ſon autre vertu qui le bruſle.
C’eſ‍t vne choſe bien certaine que ces coquins mendie-faueurs ſouffrent vne peine incredible, à qui y regarde de pres : eſ‍tans contrains d’eſ‍tre nuic‍t & iour après à ſonger pour plaire au tyran, & ſe rompre, ſe tuer, & trauaiiler pour inuenter nouueaux moyens de trahir, de tuer, de paillarder, de piller, de deſrober,

& qu’ils laiſ‍ſent leur gouſ‍t pour le ſien,

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