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MANDRIN.

baïonnette au bout du fusil ; les servantes n’en sont pas plus effray ées que les maftresses ; elles ne voient en lui qu’une charmante figure, aussi appétissante que ses marchandises. A Brioude, il se montre infiniment galant pour l’entreposeuse du tabae, tout en prenant 8000 livres dans son comptoir. Il exerça là nombre de violences et commit plusieurs assassinats, particulièrement envers les employés des Fermes. Le 29 août, Montbrison vit dans ses rues trois escouades de trentesix contrebandiers, le bonnet à la hussarde retroussé sur l’oreille ganche. Après avoir fait de l’argent chez l’entreposenr, Mandrin alla à la prison faire des hommes. Il y tria onze camarades, excluant les voleurs avec affectation. Puis, fatigué sans doute de cette expédition, il traverse la Bresse et, après cette nouvelle marche de 170 lieues, entre en Suisse et se repose un mois.

Au commencement d’oetobre, les infatigables bandits se remettent en marche, passent le pont de Grésin, près du fort de l’Ecluse, à Bellegarde, et sont le lendemain à Nantua, où l’accueil ne fut pas tout à fait ce qu’ils attendaient. Ecoutons là-dessus une chronique nantuate :

« La première année de Tannegny comme prieur (c’est 1764) fut signalée à Nantua par un événement tragi-comique. Le fameux Mandrin et sa bande, munis de nombreux ballots de marchandises, firent invasion dans la ville, où une lutte armée s’engagea. Les bandits, par leur audace, imposèrent d’abord aux habitants et profitèrent de la terreur pour piller quelques maisons. Ils allèrent au presbytère, où ils trouvèrent le enré Goyffon ; ils burent son vin, mais ils ne purent s’emparer des richesses de la sacristie ; on ne leur en donna pas le temps. Les habitants les plus courageux