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ET JULISKA.

front soudain se couvrait de sombres nuages ; Juliska

alors se sentait venir le frisson. Sa seule consolation était dans Gyula, beau garçon venu à l’âge de dix ans dans la maison de Mihal, qui un matin l’avait amené aveclui de Teineswar, sans qu’on sût autrement qui il était, ni d’où il venait. Gyula était laborieux, intelligent, adroit ; Mihal l’aimait, le traitait comme un fils, et Gyula aimait Juliska, un peu plus même qu’on n’aime une seur ; elle, en retour, le ehérissait de toute son âume. Au moment où commence ce récit, on était au mois de décembre 184… ; un orage des plus violents, enveloppant toutes les plaines du Banat, ébranlait sur sa route les huttes de bois et les maisons de terre des villages. Nulle part, dans le pays d’alentour, l’eil n’apercevait cette verdure tendre des champs, an sein de laquelle s’élèvent pendant l’été Nagy-Balas et KisBalas, mais il ne voyait qu’une couche épaisse de neige, laquelle, soulevée par des tourbillons de vent, allait s’accumulant et se tassant par places. L’hiver court et sévère venait, cette année-là, de faire son apparition avec une fureur extrême, semblable à un tyran décidé à mettre à profit son règne éphémère ; l’hiver sévissait avec nne rigueur particulière dans les plaines du Banat.

Il faisait nuit depuis longtemps, quand un traîneau attelé de einq chevaux de front entra au grand galop dans le village de Nagy-Balas. A peine en les voyant aurait-on donné à ces petits chevaux assez de force pour supporter quelques instants une course pareille ; pourtant ils venaient dans les six dernières heures, de parcourir au moins douze milles ; puis, comme s’ils avaient senti qu’ils approchaient de chez eux, la rapidité de leur allure avait redoublé, et e’étaitles naseaux