Page:Revilliod - Portraits et croquis, tome 2, 1883.pdf/393

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
383
ET JULISKA.

velure noire comme s’il avait voulu s’obliger à se convainere qu’une nouvelle pareille n’était pas un rêve. Au bout d’un assez long intervalle de silence, il reprit : « Juros, dit-il d’une voix étouffée et très sourde, donne-moi la main ! »

Le Bohémien obéit à l’injonction. & Tu trembles, pourquoi ? demanda Pal. Je n’ai pas l’intention de te faire ancun mal, aurais-tu peutêtre perdu la raison, ou bien es-tu malade ? Je ne te gronde pas non plus, mais voyons, répète-moi encore une fois le nom de l’enfant ! >- « Il s’appelle Gyula, et sert en qualité de premier valet chez ton beau-frère, Papafi Mihal, le juge de Nagy-Balas. Mais ce n’est pas ma main qui tremble, c’est la tienne, c’est toi qui es malade, ce n’est pas moi ! — Juros, si tu n’as pas la fièvre, et si tu sais ce que tu dis, songe qu’au ciel il y a un Dieu, et un Dieu qui fait souffler le vent chand et le vent froid, il envoic les loups dans nos pays pour y dévorer les agneaux ! Songe que tu étais gelé et étendu comme mort dans les champs, et que le loup qui aurait pu te dévorer, toi, c’est Gyula qui l’a tué ! réfléchis que ce n’est pas moi ni mes voisins qui avons dit à Gyula d’aller te sauver, mais bien que c’est Dieu qui l’a envoyé, songe à cela ; tu m’avoueras alors si, oui ou non, tu m’as dit la vérité ! — J’ai dit la vérité, répondit le Bohémien avec émotion.

— Songe, Juros, que nons voici devenus vieux, toi et moi ! J’ai voulu te tuer, parce que tu m’as privé de ma femme et de mon enfant, mais de ce jour je ne te hais plus, Juros ! Cherche dans tout ce qui m’appartient une chose qui te plaise, n’importe, prends, et répète-moi encore une fois que tu m’as bien dit la vérité, que Gyula cst mon fils !