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GYULA

se serait jetée dans ses bras, tout le passé aurait été oublié ; mais Juliska n’avait plus d’yeux pour celui qui avait renvoyé son Gyula, brisé sa vie, et quand pour la première fois Mihal appela sa fille ma Juliska, elle ne l’entendait seulement pas. Dans ce moment Juliska était belle ! e Ma Juliska ! » Mihal ne put en dire davantage ; il répéta cette douce appellation d’abord très bas, puis si tendrement qu’on aurait dit Gyula qui appelait son amante ; sur quoi Juliska sentit les bras do son père qui l’entouraient, puis un baiser sur son front, et en même temps elle entendit Mihal qui lui disait : « Calme-toi, ma fille, un jour viendra, j’espère, où tu pourras appartenir à Gyula. » Ce fut seulement alors que la fille regarda son père ; elle était toujours daus ses bras et ils pleurèrent ensemble. Les recruteurs avaient fait leur entrée dans le village de Dobany, bourgade située du côté de Temeswar, à environ huit lienes de Nagy-Balas. Le cabaret était comble ; dans un coin, les Bohémiens se tenaient aceroupis, arrachant à leurs instruments des accords sauvages, lesquels se perdaient dans le bruit des conversations et des chauts, tandis qu’autour de la table on voyait une trentaine de jeunes garnements buvant et faisant tapage, ay ant an milieu d’eux les hussards venus là pour racoler. « Allons, buvons ensemble ! se mit à crier un des hussards ; voyons, enfant, ne veux-tu pas être des nôtres ? > Ces paroles s’adressaient à un nouvel arrivant, qui n’était autre que Gyula. Il avait aperçu les recruteurs la veille et venait se faire engager. L’entrée de Gyula dans le cabaret ne manqua pas d’attirer