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ET JULISKA.

toute la vérité ou en faisant des réserves ; ce fut ce dernier parti qu’il choisit, moins parce qu’il y voyait un moyen d’arriver plus sûrement à son bnt, que parce que la vérité ne lui semblait dans l’occurrence pas utile à dire.

En outre, il est dans le caractère des Bohémiens, s’il y a à ehoisir entre deux chemins, entre un droit et un détourné, de choisir par goût toujours ce dernier. Le Bohémien ment et dérobe souvent par pur plaisir de mentir et de dérober, et souvent il abandoune au premier venu qui le lui demande un objet dérobé au péril de sa vie. Du reste, Juros n’avait guère lieu de désirer allonger la conversation avee le sergent, d’autant plus qu’un des hussards, se détachant de ses compagnons, venait de s’approcher de Gyula et se préparait à le tirer de sa rêveric en le faisant boire avec lui. Juros, dont l’eil ne perdait pas de vue Gyula, mesura immédiatement le danger et, tout en suivant avec une angoisse fiévreuse chacun des mouvements faits par ces deux hommes, il dit avec un accent de terreur au sergent : Ça t’est égal de savoir qui est le père de ce garçon ; mais sacho-le bien, ce père sera malheureux si on lui enlève son fils ; combien demanderais-tu pour le lâcher ?

— Combien ? s’écria le sergent de lussards tout ébahi ; erois-tu donc, âme noire, que je me laisse marchander, par un honme comme toi, un enfant volé ?

— Eh bien ! le garçon n’est pas encore à toi, tu ne l’auras même jamais ; mieux vaut te parler raison, et si je te disais d’où sort Gyula, qui il est, tu chanterais bien vite sur un antre ton. — Pas besoin de causer davantage, > murmura d’un