Page:Revon - Anthologie de la littérature japonaise, 1923.djvu/185

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Quand je mettais, si familière était
La femme que je possède !
De combien loin l’aller
De ce voyagel Voilà ma pensée[1].

À cette composition, tous laissèrent tomber leurs larmes sur le repas et se lamentèrent[2].

Ils allaient, ils allaient, et ils parvinrent au pays de Sourouga[3]. Arrivés au mont Outsou, le chemin qu’ils voulurent prendre était sombre et étroit ; cisses et kazoura y étaient denses[4]; leurs cœurs devinrent minces, et ils voyaient déjà quelque aventure redoutable. Sur ces entrefaites, ils rencontrèrent un pèlerin, qui leur demanda : « Pourquoi êtes-vous venus sur ce chemin ? » Et à le regarder, c’était un homme qu’il avait connu ! Alors il écrivit cette lettre, pour une personne de la capitale :

Auprès du mont Outsou
Dans Sourouga,
Eveillé
Ou en songe, personne
À rencontrer[5] !

Quand il contempla le mont Fouji au dernier jour de la lune des pousses hâtives[6], la neige tombait, toute blanche :

Celle qui ne connaît pas le temps,
C’est la cime du mont Fouji !
Quand donc,


  1. « Vêtement de Kara » (nom générique pour la Chine ou la
    Corée), est un mot-oreiller du verbe « mettre ».
  2. Ces larmes sembleraient ridicules si on ne se rappelait que, dans la poésie japonaise, les jeux de mots ont un caractère aussi sérieux que les rimes riches dans la nôtre.
  3. Le pays du Tokaido dont Shizouoka est la capitale.
  4. Tsouta (Cissus Thunbergii), une ampélidée analogue à notre vigne vierge. Kazoura : voir ci-dessus, p. 115, n. 1.

  5. Jeu de mots sur Outsou, nom géographique, et la « réalité »,
    par opposition au « songe ». — La rencontre fortuite d’un homme
    qu’il avait connu attire justement l’attention du voyageur sur ce
    fait que, jusqu’à présent, il n’a rencontré aucun ami.
  6. Voir p. 286, n. 5.