Page:Revon - Le shinntoïsme, 1907.djvu/16

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Ce n’est pas que cette religion ait toujours gardé sa pureté

    s’infiltra peut-être chez eux dès les premiers temps de l’ère chrétienne, elle ne semble guère être devenue générale que vers l’an 400 après J.-C. Cela dit, nous pouvons constater, d’abord, l’existence de toute une littérature orale, très ancienne, qui fut longtemps conservée par la seule tradition : d’une part, plus de deux cents petits poèmes, et d’autre part, près d’une trentaine de rituels du Shinntô. Les poèmes (ou chants, outa) se trouvent recueillis pour la première fois dans le Kodjiki et le Nihonnghi, au début du VIIIe siècle, et les rituels (norito) dans le Ennghishiki, ou règles de l’ère Ennghi, au commencement du Xe siècle ; mais les uns et les autres sont à coup sûr beaucoup plus anciens, et les rituels notamment, si précieux pour nous, renferment sans contredit la vraie religion indigène (voy. p. 5, n. 1). – La littérature écrite est représentée d’abord par des ouvrages d’histoire. Sans parler des historiographes officiels du Ve siècle, dont le Nihonnghi nous donne quelques échos, et en mettant de côté le Kioudjiki, grand recueil d’annales compilé en 620, mais livré aux flammes en 645, et dont il ne nous reste qu’une partie très discutée, les premiers livres d’une authenticité certaine que nous possédions sont le Kodjiki, ou Recueil des choses anciennes, et le Nihonnghi, ou Chroniques du Japon. Le Kodjiki, projeté dès la fin du VIe siècle et publié en 712, est l’ouvrage historique le plus sûr à consulter, parce qu’ayant été écrit tout simplement sous la dictée d’une vieille personne du pays, il ne porte que très peu de traces de l’influence chinoise. Le Nihonnghi, au contraire, bien que publié dès l’année 720, veut être manié avec infiniment plus de prudence, parce qu’il fut élaboré par des lettrés ; mais il vient compléter fort utilement le Kodjiki, en nous donnant sans cesse, sur chaque récit, de nombreuses variantes puisées à d’autres sources, et notamment dans divers documents très anciens qui depuis ont été perdus. — À côté de ces deux grands recueils d’annales, la littérature du ville siècle nous offre encore d’autres écrits historiques, moins importants, parmi lesquels on peut cependant mentionner la Shôkou-Nihonnghi, collection des édits impériaux (mi-koto-nori) rendus de 696 à 791. — Enfin, un dernier recueil à signaler, c’est le Manyôshiou, ou Collection d’une myriade de feuilles, anthologie qui parut probablement vers 750, ou peut-être seulement au début du IXe siècle, mais qui en tout cas nous donne plus de 4.000 poésies de la dernière moitié du VIIe siècle et de la première moitié du VIIIe ; donc, toute une mine de détails vivants qui nous aident à mieux comprendre la psychologie des vieux Japonais. — En somme, de tous ces documents, les plus précieux pour notre étude seront : d’abord, les rituels, pour tout le fond des conceptions religieuses aussi bien que pour la pratique du culte ; puis, le Kodjiki, pour toute la partie mythique ; enfin le Nihonnghi, à cause surtout des éclaircissements précis qu’on peut obtenir en comparant ses diverses variantes. Reste alors à indiquer seulement les montagnes de commentaires édifiées par les érudits japonais sur ces documents eux-mêmes. Pour cette dernière catégorie d’ouvrages, voy. p. 6, n. 2, et cf. p. 15, n. 1, 1°.

    Nos références à ces sources se traduiront par les abréviations suivantes :

    R = Rituel (norito). — R. I, R. II…, signifient : Rituel n° 1, Rituel n° 2…, dans l’ordre où nous les donne le Ennghishiki, et qu’on peut retrouver dans