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revue musicale de lyon

défie d’une telle popularité : elle le conduirait en effet au culte du colpo di gola, et à une mauvaise tenue scénique.

Mlle Claessen a été fort applaudie, ainsi que M. Sylvain qui a mis sa belle voix au service d’un rôle moins qu’intéressant. Quant à l’orchestre, il s’est aussi parfaitement comporté que pour Salammbô, et il n’y a que des louanges à adresser à M. Flon.

La représentation de Lakmé nous a fait voir la troupe d’opéra comique sous un jour tout autre que celui où nous l’avait montré la reprise de Mignon. L’opéra comique, — il serait plus juste de dire l’opérette, — de Delibes a reçu en effet une interprétation satisfaisante. Mlle Davray dont l’amour pour les sons filés est peut-être un peu excessif, a plu en général par son indéniable talent, la pureté de sa voix, et son habileté de comédienne. M. Gauthier est d’une élégance et d’une tenue douteuses, il vise trop aux effets de force, mais sa voix est belle, et on peut mieux attendre de lui. Mlle de Véry a été exquise comme toujours. Les autres rôles étaient convenablement tenus, celui du Brahmine excepté. En définitive, et grâce surtout à l’orchestre, cette reprise a été tout à l’honneur du Grand-Théâtre.

Edmond Locard.
Faust

L’œuvre célèbre de Gounod est trop connue pour qu’il soit utile de porter sur elle un jugement quelconque. Du reste l’opinion publique est presque unanime :

Faust est le plus beau des opéras… Nous nous en voudrions de nous inscrire en faux contre cette opinion, mais nous reproduisons les réflexions très justes de M. Julien Tiersot parues naguère dans le Guide Musical :

« Certes, le Faust de Gounod est un ouvrage du plus grand attrait : il a pourtant un défaut, et c’est… d’être Faust ! Oh ! si la pièce, au lieu de se passer en Allemagne au xve siècle, avait pour théâtre quelque petite ville de la province française, pas trop loin de Paris, à une époque beaucoup plus récente ; si elle se déroulait dans quelque calme milieu familial, celui d’un roman de George Sand ou d’Alphonse Daudet ; si le principal personnage, au lieu de s’appeler Faust, conservait seulement son prénom d’Henri, — Marguerite

pourrait garder le sien ; quant à Méphistophélès, il deviendrait… comment dire ? mettons Desgenais ; — si les soldats étaient de braves troupiers des armées d’Afrique ou de Crimée, rentrant dans leurs foyers, musique en tête, et si les vieillards regardaient passer les bateaux-mouches en buvant du petit vin d’Argenteuil, on n’aurait pas trop de louanges pour une musique si bien appropriée et d’une si haute valeur. Et le ténor pourrait chanter toutes les cavatines qu’il voudrait ; comme elles sont charmantes, personne ne se lasserait de les entendre. La tendre Marguerite roucoulerait avec lui des duos d’amour qui d’abord avaient été des chants d’église, comme ce fut le cas pour la jolie phrase : « Ô nuit d’amour, ciel radieux, » qui primitivement fut un O satularis de l’abbé Gounod (on n’a qu’à appliquer à ce chant les paroles latines pour se convaincre qu’elles s’y adaptent infiniment mieux que les vers français, que MM. Jules Barbin et Michel Carré y ont substitués). »

L’interprétation de samedi a été à peine suffisante. M. Gauthier a été d’une distinction douteuse et a, selon son habitude, chanté au-dessous de la note. M. Bruinen, lui, a chanté franchement faux et a donné au rôle de Méphistophélès un caractère grotesque tout à fait déplacé. Mme Mazarin n’a pas produit une aussi bonne impression que dans Salammbô. Les autres artistes étaient suffisants dans les rôles secondaires.

Quant à l’orchestre, il s’est reposé sous la direction de son second chef et nous a ramenés aux beaux jours de l’an dernier en faisant preuve d’un calme, d’une indifférence et d’une indépendance admirables.

L. V.

LES CONCERTS

La Symphonie Lyonnaise donnera incessamment son premier concert de la saison.

Au programme : Symphonie en ut majeur (No1) de Beethoven. — Prélude du 3e  acte des Maîtres Chanteurs (R. Wagner). — Suite Algérienne (Saint-Saëns). — Le Calme de la Mer (Mendelssohn). Danses hongroises (Brahms).

La Schola cantorum lyonnaise va reprendre bientôt ses séances pour la préparation de

son deuxième concert qui sera donné sous la