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le piano la redit, en accentuant les deuxième et quatrième temps. Il est à remarquer que dans cet allegro le temps fort, ou mieux le temps lourd, est fréquemment frappé sur le deuxième et le quatrième temps de la mesure.

Tantôt cette joie éclate par la série de quatre accords plaqués fortissimo en blanches et revenant trois fois.

Le ravissant thème en la avec variations est tout à fait dans le style de Mozart. Il en est de même de la première variation confiée au piano. La seconde variation excessivement brillante pour le violon est soutenue au piano par un rythme léger bien personnel au Maître. La troisième variation en mineur est d’une grande largeur de style : elle donne la note grave et sérieuse de la sonate. En revanche la quatrième variation est tout ce qu’on peut imaginer de plus suave, de plus céleste ; le babillage entre le piano et le violon qui la termine est exquis.

Le rondo final en 6/8 et en ré majeur, c’est encore de la gaîté pure. Peut-être dans le retour en mineur du motif du début sent-on poindre une teinte de mélancolie. Le caressant chant de violon en fa qui lui fait suite, ramène promptement et victorieusement les idées riantes.

En résumé en écrivant cette charmante sonate Beethoven était dans toute l’ardeur de sa jeunesse et sous l’impression d’une joie sans mélange.

La deuxième sonate comprend trois parties.

L’allegro vivace en 6/8 et en la majeur débute par une succession de groupes de deux croches séparées par un demi soupir. L’assemblage de ces groupes réalise une mélodie vive et alerte. Mais bientôt s’élève un chant pénétrant et expressif du violon commençant par un ut dièze sur la quatrième corde. C’est la personnalité du Maître qui se révèle. Elle s’affirme encore plus fortement dans une phrase liée dite piano à l’unisson par les deux instruments. Un sentiment de douleur concentrée a inspiré cette mélodie reprise par trois fois.

Dans le passage intermédiaire entre les deux mélodies si caractéristiques dont il vient d’être question, des noires fortement accentuées sont attaquées sur la deuxième croche du temps. Une suspension d’une mesure entière se trouve intercalée. Ces effets rythmiques contribuent à l’expression d’un sentiment de souffrance. Elle se dissipe cependant à la fin de cette première partie. La mélodie pétulante en groupes de deux croches reparaît. Ces groupes s’enchevêtrent entre la main droit et le violon. Ils se désenlacent, s’espacent et s’éteignent doucement.

L’andante piu tosto allegretto est de temps en temps joué à l’Offertoire par l’éminent organiste de notre Primatiale : il est bien à se place à l’Église. N’est-ce pas en effet la prière d’une âme affligée qu’exhalent tout d’abord le piano puis le violon ? La phrase suivante dite en canon est-elle autre chose que le suave murmure de deux voix d’en haut ? L’invocation plaintive initiale se fait entendre à nouveau, mais enrichie de réponses dialoguées. La terminaison par une nouvelle phrase angélique en canon procure la douce sensation de la consolation et de l’apaisement.

L’allegro piacevole terminal est en 3/4 et en la majeur.

La première phrase ne reflète que des sentiments aimables. Peu après le violon vient délicieusement chanter en ré majeur la parfaite félicité. Dans son ensemble cet allegro piacevole célèbre la paix de l’âme reconquise.

Cette sonate est en somme un petit drame intime. Les sentiments les plus opposés s’y trouvent successivement et merveilleusement exprimés.

La troisième sonate qui complète la trilogie de l’œuvre 12 est assurément la