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Page:Revue d’économie politique, 1888.djvu/468

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sommation ; car, tandis que production signifiait primitivement l’offre en vente, et consommation uniquement l’achat. J.-B. Say se servit du mot production pour indiquer le fait de donner une valeur à quelque chose et du mot consommation pour indiquer la destruction de la valeur. Il consacre aussi des chapitres séparés et indépendants à la production, à la distribution, à la consommation.

Or, si l’on veut bien réfléchir un instant, on voit que, tant que l’on retient le commerce comme le concept fondamental de la science économique, c’est une science positive, précise et intelligible, dont la loi fondamentale est la loi de valeur. Mais si on la brise en trois fragments, elle devient absolument inintelligible comme science précise. L’épine dorsale de la science, l’épine dorsale de la théorie de valeur est brisée.

Je vais montrer combien est erronée cette façon d’envisager la science.

Say lui-même considère comme richesse les instruments de crédit, tels que les billets de banque et lettres de change, les valeurs financières, la propriété littéraire, l’expérience professionnelle, etc.

Or, comment parler de production, de distribution et de consommation de billets de banque, de lettres de change, de valeurs financières, de propriété littéraire, d’expérience professionnelle ? Et pourtant l’achat et la vente de ces choses est d’usage courant.

J.-B. Say s’est appliqué à démontrer que les aptitudes de toutes sortes sont une richesse. Il les appelle richesses immatérielles.

Comment parler de production, de distribution et de consommation des aptitudes humaines ? Et pourtant elles ont une valeur qui s’apprécie en argent. Il est d’usage courant de parler d’offre et de demande de travail.

L’ouvrage de J.-B. Say a, pendant près d’un demi-siècle, servi de moule à la notion continentale de l’économie politique, et la plupart des manuels usuels et des traités n’en sont guère que des adaptations, avec de légères différences.

Le traité de Mill, entre autres, a été, en la forme, à peu près moulé sur l’ouvrage de M. Say, quoiqu’il s’en écarte jusqu’à un certain point.

Mill traite l’économie politique comme la production, la distribution et l’échange de la richesse. Or, dans la langue primitive des économistes, c’est tout simplement échange et échange.