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Page:Revue de Belgique, série 2, volumes 58-59, 1910.djvu/355

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partisans de Brahms et ceux de Wagner, animosité vraiment mesquine, car chacun des partis, par un ridicule esprit d’intransigeance, niait toute valeur à l’autre. Ce fut cette querelle, âpre et violente, qui fit tant souffrir Bruckner, et le découragea maintes fois. Bruckner, en effet, parce qu’admirateur passionné de Wagner, vit aussitôt se liguer contre lui tous les brahmsiens qui confondirent dès lors dans un même esprit de haine, brucknériens et wagnériens. Cette lutte, douloureuse pour le maître autrichien, lui fut d’autant plus pénible qu’il se heurtait à une hostilité systématique qui devait perdurer jusqu’à sa mort. Comme l’a dit R. Louis, « Vienne fut sa Jérusalem où il trouva son Golgotha ».

D’autre part, le changement de milieu occasionné par la venue de Bruckner à Vienne, fit grand bien à ce dernier en ce sens qu’elle l’empêcha, restant à Linz, de devenir une célébrité locale. Vienne donna le monde comme champ d’activité à Bruckner ; il y trouva des élèves qui propagèrent ses œuvres et des critiques qui les défendirent ; il profita également, à Vienne, de l’exécution, par un orchestre de premier ordre, de ses œuvres premières ; il put ainsi en constater les défauts afin d’y remédier pour en donner la version définitive.

Ainsi que nous venons de le dire, Bruckner rencontra à Vienne une hostilité injustifiée, particulièrement dans la presse musicale laquelle, après l’avoir apprécié assez favorablement à ses débuts, s’empressa bientôt de l’accabler sous les critiques les plus acerbes.

Il n’y eut qu’une faible partie du public qui accueillit favorablement Bruckner à ses débuts et encore, ce public qui fréquentait les concerts donnés par le compositeur était-il, en majeure partie, composé d’amis, comme le public parisien qui allait écouter en 1846, la Damnation de Faust, de Berlioz, à Paris.