Bruckner, dès qu’il vit Vienne, a tracé bien nettement la voie qu’il va suivre : la forme symphonique pure, et nous allons voir se succéder, à peu d’intervalle, les neuf symphonies du maître.
Le 26 octobre 1873, il donne son premier concert ; il s’y produit comme organiste (toccata en ré de Bach et fantaisie pour orgue de sa composition) et comme compositeur, avec sa 2e symphonie en ut mineur.
Dans toute la presse viennoise, un seul organe sera le défenseur de Bruckner : la Neue freie Presse, qui rendit compte du grand succès obtenu par le maître symphoniste, malheureusement devant un public composé quasi exclusivement d’amis. Une deuxième exécution de la symphonie, le 26 février 1876, souleva, à la fois, une tempête de sifflets et d’applaudissements. À la suite de ce concert, Hanslick, le critique le plus en vue de Vienne, attaqua violemment Bruckner. Les exécutions de la 4e symphonie (20 février 1881), de la 6e (11 janvier 1883), de la 7e (20 février 1886), de la 8e et du Te Deum (1886), provoquèrent à la fois des admirations enthousiastes et des critiques violentes.
Mais l’opposition était telle que plusieurs œuvres de Bruckner ne peuvent être exécutées qu’après la mort du compositeur, par exemple la 5e symphonie.
Les partisans de Wagner étaient à peu près les seuls à défendre le maître autrichien et encore était-ce surtout parce qu’ils voyaient en lui un disciple de leur dieu plutôt qu’un musicien essentiellement original et créateur.
La mort d’Herbeck (1877) fut une grande perte pour Bruckner qui se voyait entouré d’une foule nettement hostile soutenue par Hanslick, tandis qu’il n’avait, pour le défendre, que ses quelques élèves et de rares musiciens, parmi lesquels le plus enthousiaste, Hugo Wolf, devait payer chèrement son trop grand dévouement à la cause brucknérienne ; les brahmsiens ne le lui pardonnèrent jamais. Toutes ces luttes