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LE SOVIET DE PÉTROGRAD

avoir démocratisé cette armée, la garder plus forte que jamais pour défendre la cause de la Révolution ; mais en même temps il faut donner au monde l’impression que tout ce qui est humainement possible sera fait en vue d’abréger la durée de la guerre.

Nous arrivons ainsi au célèbre manifeste signé par le Soviet, à la date du 28 mars (nouveau style).

Ce manifeste accuse une double tendance. Il s’adresse « aux peuples de l’univers ». C’est donc un appel aux nations qui rappelle le grand cri jeté par la Révolution française. Et c’est en effet de cet exemple que les membres du comité se sont inspirés. Un des orateurs du Soviet, Stekloff, l’a dit très nettement en faisant allusion à toutes les révolutions françaises, notamment à celle de 1848 qui a provoqué une émotion profonde, même en Allemagne et en Autriche, et que, seule, l’intervention de Nicolas Ier semble, d’après lui, avoir rendue stérile[1]. Mais, d’autre part, le manifeste débute par ces mots d’une inspiration nettement socialiste : — Camarades et prolétaires de tous les pays — et finit par ceux-ci, connus depuis le fameux appel de l’Internationale en 1864 — Prolétaires de tous les pays, unissez-vous — qui, comme nous avons eu l’occasion de le démontrer, sont dus à l’initiative des socialistes français, dont la tendance constante a été de donner une portée universelle et internationale à leurs manifestations démocratiques[2].

Le document poursuit :


Nous, ouvriers russes et soldats, nous vous annonçons le grand événement de la Révolution russe et nous vous adressons nos vœux enflammés… Notre victoire est une grande victoire de la liberté universelle et de la démocratie. Le Gouvernement russe n’est plus le pilier principal de la réaction universelle et le gendarme de l’Europe… Consciente de sa force révolutionnaire, la démocratie russe déclare que, de tout son pouvoir, elle s’opposera à la politique de conquête des classes dominantes, et elle appelle toutes les nations de l’Europe à des efforts combinés en vue des démarches en faveur de la paix universelle. Et nous nous adressons aussi à vous, frères prolétaires de la coalition austro-hongroise et, avant tout, au prolétariat germanique. Depuis le commencement de la guerre, on a essayé de vous persuader que, prenant les armes contre la Russie autocratique, vous

  1. Voir Informations du Soviet, no 18.
  2. Voir notre Histoire du Parti républicain au Coup d’État et sous le Second Empire, p. 439.