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REVUE DE PARIS

tant de travaux incroyables. Bien plus, il met à la disposition des historiens à venir, ces nobles matériaux qu’il a entassés, afin que d’autres viennent glaner aux mêmes lieux où il a moissonné, afin que d’autres viennent recueillir ce qu’il a semé. En même temps, cet homme si modeste dans son livre, arrivé à cette causerie familière, se plaint de l’oubli où il a été laissé par ses contemporains, — de ses travaux méconnus, — de ses veilles négligées : touchantes plaintes d’un excellent homme qui rêve la gloire à ses heures de loisir, une fois chaque année, et quand il a le temps de rêver. Enfin il se rend à lui-même cette justice, — que le premier il a donné aux Français l’histoire nationale. Or, c’est là une justice que personne ne contestera à l’illustre auteur (illustre, honoré, respecté et applaudi, quoi qu’il en dise) de l’Histoire des Français des divers états aux cinq derniers siècles.

Ce livre est rempli à chaque page de faits ignorés, ou, ce qui revient au même, de faits mal connus. C’est ainsi que dans le chapitre xvi, où il est question des lois et des magistrats, il est prouvé que l’auteur de l’Art poétique était non pas le fils d’un greffier, comme il le dit lui-même, mais le fils d’un commis-greffier. Plus loin vous apprenez dans quel risible livre Molière a trouvé le titre de sa comédie de George Dandin. Histoire, poésie, littérature, anecdotes, découvertes de tout genre, hœc est ferrago lihelli.

Maintenant qu’il est fait et imprimé, et tout rempli qu’il est de recherches et de découvertes infinies, qui viendra en aide à ce livre qui n’est, à tout prendre, que le résumé élégant, concis et complet, de six cents manuscrits précieux cités dans l’Histoire des Français, ce noble et patient chefd’œuvre de science, d’imagination et de style, de M. Alexis Monteil ?

Ces manuscrits, l’honneur de cette savante bibliothèque, seront mis en vente le 26 novembre prochain, car c’est la loi commune de tout pauvre savant qui a de beaux livres, il faut qu’il les vende quand il s’en est servi, pour en acheter d’autres dont il a besoin. Il faut qu’il dise adieu aux vieux amis de ses travaux passés, — un adieu éternel.

Le livre de M. de Monteil nous consolera, lui et nous, de la perte de ces manuscrits, car ce livre contient leur pensée, leur esprit, leur ame, comme dit l’auteur.

Ce livre précieux sous tant de rapports, comme traité de conservation et de classification, sera avant peu la diplomatique, le manuel des archivistes. des bibliothécaires, des bibliographes, des gens de lettres. — C’est enfin un assemblage unique de précieux matériaux qu’avait réunis ta science d’un seul homme, et que l’huissier-priseur aura bientôt divisé