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REVUE DE PARIS

dans la pièce de la PèrichoJe. Vous n’ignorez pas, sans doute, que M. HK ;riniée écrivit en 1829 cette comédie jouée en 1835. M. Mérimée n’avait pas songé alors que l’on pût introduire un jour un évéque dans un vaudeville, sans cela il nous eiU donné ces jours-ci une nouvelle appelée le Nonce du Pape , afin que M. Dormeuil pût monter en grade , et parût avec la robe rouge de Levasseur, le cardinal de la Juive. Aujourd’hui, le séminaire est au théâtre ; Saint-Sulpice est mis en vaudeville, et les chappes sont hors de prix !

Espérons que ; M. Dormeuil nous donnera toujours M"* Déjazet, vive et sémillante dans tousses rôles ; mais qu’il ne se croira plus obligé de prononcer le benedicat vvs en couplet final sur le front de cette autre Sophie Arnould. Quoi que puisse faire M. Dormeuil, monseigneur de Ghâtel sera toujours meilleur comédien que lui !

Au Vaudeville, nous avons eu avant-hier ini Mariage sous VEmpire ; la pièce est tirée d’un roman de M""" Gay. Elle consiste dans un jeune conseiller d’état, auquel sa future reproche de n’être pas militaire, cl dans un militaire que sa future ^"oudrait voir conseiller d’état. Ces sortes de comédie à partie doul)le, réussissent rarement, et il faut un grand art de dialogue pour les animer. Les mœurs de l’empire avaient fourni dans le temps à M. Duport , l’un des auteurs de la pièce d’hier, des traits charmans de critique et d’ironie ; c’était mieux que du vaudeville , c’était de la bonne et vraie comédie. La Dame de VEmpire, sujet traité déjà par M. Duport, homme d’esprit et de goût, nous remettait en mémoire les bons contes dont nos salons du faubourg Saint-Germain ne manquaient pas de se régaler au sujet de la maréchale Lefebvre. La maréchale Lefebvre n’avait eu rien, sa vie durant, de la maréchale de Bouillers ; elle avait un mari soldat et bon soldat, ce qui après tout doit être respecté mCme par le vaudeville. Je ne connais au monde qu’un roman qui ait attaqué et même battu, justement , à plat de couture, le (jénéral de l’empire. Ce roman, c’est celui d’indiana. Le colonel Delmare vieux et goutteux, espèce de capitoul emporté, de mari fâcheux et morose, tyran domestique de chaque pensée et de chaque goût de sa femme, méritait à coup sûr toute l’inclémence du pinceau de M’"<^Sand. Mais le colonel du vaudeville de M""* Duport et Ancelot ? Fallait-il donc nous le montrer si injustement méconnu de sa femme, ce jeune et beau colonel qui donne des cachemires aux filles d’Opéra, d’après les nouvelles de M. de Balzac, et des écrins d’après Michel et Christine ? Pourquoi ce baron qui parle de son château comme un Cassandrc, et celte paysannerie de mauvais goùl dans la pièce ? M. Duport, auteur spirituel et fin, a cherché du moins à corriger ce que ces invraisendjlanccs avaienl <le fâchiîux, par des mots d’esprit et un rôle charmant poiu’ Laiont. Lafont a joué avec verve ce rôle de mari, moilié colonel et moitié conseiller d’étal.

Si le parterre du Yaudevilh ; n’a guère inquiété cet hyménée du temps de l’empire, en revanche, les spectateurs des Français ont osé si fier un mariage fait par Molière, celui de l’excellent Georges Dandin !