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REVUE DE PARIS

On élit parmi nous
L’abbé des fous.

La dignité d’abbé des cornards étant annuellement élective, donnait lieu à beaucoup de brigues, et changeait souvent de titulaire.


Cornards sont les Buzot et non les Rabyllis
O fortuna potens quam variabilis,

dit une espèce de poème macaronique du xvie siècle, où figurent des noms de familles qu’on connaît encore aujourd’hui dans l’Eure.

Le cérémonial usité pour l’abbé des cornards ne différait des autres divertissemens du même genre, que par le libretto, qui variait nécessairement en raison des personnalités toutes locales, qu’il était, avant tout, destiné à répandre. Aujourd’hui même il se chante encore à Évreux, paimi le peuple, des espèces de Noëls qui ont fait évidemment partie de ce rituel grotesque ; et le Mercure d’avril 1725 a conservé tout entière une de ces pièces, où il est question d’un certain prieur de Saint-Taurin, don Bucaille, dont les visites à la dame de Yenisse, abbesse du couvent de Saint-Sauveur, avaient donné lieu à de malins commentaires.


Vir monachus in mense julio
Egressus est è monasterio
C’est dom de la Bucaille.
Egressus est sine licentia
Pour aller voir dona Venissia
Et faire la ripaille, etc.

Cette coutume, comme toutes celles du même genre, qu’on vient de décrire, doivent certainement choquer, au premier abord, par leur inconvenance et leur grossièreté bizarre ; mais ceux qui s’en scandaliseraient, ou prétendraient en faire un texte à imputations contre telle classe ou tel ordre de choses, doivent, avant tout, envisager ces usages dans leurs rapports avec les mœurs et les usages de leur époque. Tel est, en général, le point de vue où il faut se placer pour juger sainement, impartialement les hommes,