Page:Revue de Paris - 1905 - tome 2.djvu/364

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
362
LA REVUE DE PARIS

guerre simplement heureux, ni une invention utile, ni le fait d’avoir pris part à une campagne pénible ne constituent par eux-mêmes, et indépendamment de l’aptitude, des titres suffisants à l’avancement.

Encore moins l’avancement est-il une manière d’assiette au beurre dont il s’agit de répartir le contenu, d’après un pourcentage savant, entre les différentes catégories d’officiers : tant pour l’École de guerre, tant pour Saint-Cyr ou Polytechnique, tant pour le rang, tant pour ceux-ci, tant pour ceux-là. La question est plus haute. Quand on a à choisir les dépositaires de la lourde charge du commandement, — plus lourde de jour en jour, à mesure que la guerre se fait de plus en plus scientifique, — et à confier par là-même à un homme un certain nombre d’autres vies humaines qu’il saura économiser ou qu’il gaspillera en pure perte, suivant qu’il sera habile ou non, il s’agit franchement d’autre chose que de satisfaire des ambitions, voire des appétits.

Je n’apprendrai rien à personne en disant qu’actuellement, chez nous, l’avancement se donne soit au choix, soit à l’ancienneté : d’abord exclusivement à l’ancienneté pour passer du grade de sous-lieutenant à celui de lieutenant ; puis partie au choix et partie à l’ancienneté, jusqu’au grade de chef de bataillon ou d’escadrons inclus ; enfin, uniquement au choix, pour les grades supérieurs.

Nous avons dit que l’ancienneté ne saurait constituer à elle seule un droit à l’avancement si le candidat ne présente par ailleurs les qualités jugées nécessaires à l’exercice du grade supérieur. Or en fait, chez nous, apte ou non, un officier passe au grade supérieur quand son rang sur l’Annuaire l’y appelle. C’est une garantie insuffisante. Est-ce à dire que je méconnaisse les droits de l’ancienneté et que je veuille voir donner tout l’avancement au choix ? Rien n’est plus loin de ma pensée. L’avancement au choix se justifiait chez nous — lorsqu’il a été institué par la valeur très inégale des éléments qui entraient alors dans la composition du corps d’officiers. Le choix était, jusqu’à un certain point, nécessaire pour fournir des officiers supérieurs et des généraux suffisamment jeunes, puisque, personne n’étant exclu de l’avancement à l’ancienneté, la masse des officiers arrivait tard.