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LA REVUE DE PARIS

connue dans le Soudan non moins qu’en Égypte. La sécurité avant 1880 y était complète. Un très faible contingent de troupes maintenait dans l’obéissance ces populations naturellement douces et pacifiques. La situation commença à se modifier vers la fin de 1881. On se mit alors à parler du mahdi et du fanatisme religieux. Mais les vraies causes des soulèvements qui éclatèrent en 1882 et qui prirent tout leur développement l’année suivante, sont d’une autre nature. On en a signalé trois : l’abolition de l’esclavage, les exactions dont les indigènes étaient victimes de la part des autorités et enfin le rappel d’une partie des troupes au moment même où les deux premières causes produisaient leurs effets. L’abolition de l’esclavage avait ameuté contre le gouvernement les négociants influents qui, en trop grand nombre, vivaient de la traite des noirs, pratiquée en grand et de la façon la plus cynique. Quant aux exactions, il faut renoncer à les décrire. Il n’y avait plus de sûreté pour les biens ni pour les personnes des Indigènes. Leur rare patience avait fini par se lasser et ils appelaient de tous leurs vœux un changement de condition. Longtemps soumis et résignés, ils étaient prêts maintenant pour la révolte. C’est alors que le mahdi, jusque-là presque inaperçu, entra en scène et apparut comme l’auteur de cet état d’esprit dont il n’était en réalité que le bénéficiaire. On l’a dit avec raison, le mahdisme fut « une explosion de désespoir ».



Au cours de l’année 1881, le mahdi, Mohammed Ahmed, attira l’attention par ses démonstrations religieuses. Réouf Pacha, gouverneur du Soudan, voulut employer vis-à-vis de lui le procédé simple qui avait déjà réussi dans des occasions analogues : il résolut de le supprimer à l’aide d’une embûche. Son délégué Abou-Saoud ayant échoué dans cette mission et ayant, même perdu sa propre escorte, Réouf assembla une plus forte troupe et l’envoya à la recherche de Mohammed. Celui-ci s’était réfugié dans les montagnes du Djebel-Gédir, au sud du Kordofan, où il réunissait de nombreux partisans. La rencontre se produisit le 9 décembre 1881. La troupe du