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Page:Revue de Paris - 1908 - tome 1.djvu/565

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LA REVUE DE PARIS

Je suis Toum, celui qui existait seul dans le Noun ; je suis Râ quand il se lève au Commencement pour gouverner ce qu’il a créé… Je suis le dieu grand qui se crée lui-même, c’est-à-dire l’Eau, c’est-à-dire le Noun père tics dieux. Qu’est-ce que cela ? (glose) : C’est Râ créant ses membres qui deviennent les dieux de la suite de Râ.

Je suis Hier et je connais Demain. Qu’est-ce que cela ? (glose) : Hier, c’est Osais (la mort) ; Demain, c’est Râ (l’avenir).

Je suis le grand oiseau Benou qui est dans Héliopolis ; je suis la somme des existences et des êtres. Qu’est-ce que cela ? (glose) : Le Benou, c’est Osiris à Héliopolis. La somme de l’existence et des êtres, c’est son corps ; autrement dit, c’est toujours et jamais ; toujours, c’est le jour, jamais, c’est la nuit.

Dans quelle mesure l’Égyptien du peuple comprenait-il ces symboles ? L’initié était seul capable de réaliser l’explication panthéiste de l’univers, matière divine qui se produit elle-même, où tout le divin est dans tout ; l’ignorant savait du moins que l’homme descendait des dieux : cette origine divine commandait sa destinée.

Vivre sur terre et mourir pour redevenir un dieu, telle était la condition de tous les êtres émanés du Créateur. Cette destinée comporte une telle somme de douleurs que le vulgaire ne saurait comprendre pourquoi les descendants de Toum ont été condamnés par le caprice de leur père à cette fâcheuse expérience de la vie terrestre. Les prêtres, qui entendent les révélations divines, enseignèrent aux hommes que la terre, en ses premiers jours, ce au temps du dieu Râ », était un Éden d’une parfaite félicité. L’homme, dont le nom en égyptien est tem, avait été fait à l’image de Toum, qui est toujours figuré sous la forme humaine. Toum, qu’on appelle aussi Atoum, est donc l’homme par excellence, ce qui le rapproche curieusement de l’Adam biblique dont le nom désigne le premier homme ainsi que l’homme en général[1]. Comment l’image vivante du Créateur fut-elle vouée à une existence si traversée d’épreuves ? On sait l’explication donnée par la sagesse orientale : l’homme,

  1. Lefébure, le Cham et l’Adam égyptiens, dans les Proceedings of Society of Biblical archeology (1893).