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madame de pompadour

Nonobstant, de nouvelles épreuves sont réservées à Madame de Pompadour. Nous sommes en 1751, l’année du Jubilé ordonné par les Bulles Pontificales et rappelé aux fidèles par le Pape Benoît xiv : le Roi est pris de retour à la Religion : à ses côtés s’agitent la Famille Royale, les dévots, les Jésuites, — au dehors, l’opinion même, — tous pleins de l’espoir que cette grande retraite l’amènera à reconnaître ses erreurs et à se séparer de sa maîtresse. Dans ce violent conflit, où menace de s’effondrer sa fortune, Madame de Pompadour soutient la lutte avec toute l’opiniâtreté dont elle est capable : Louis xv a assidûment suivi les offices et les sermons, mais les pieuses obsessions dont Il a été l’objet ne lui ont rien enlevé de son habituelle impénétrabilité ; dans l’alternative d’autorité et de faiblesse où se traîne sa volonté, Il semble cependant fléchir sous le poids de sa liaison et, sans rompre ouvertement avec la Marquise, Il ne veut plus voir en elle qu’une amie dont on a peine à se passer. Madame de Pompadour reste au château ; elle reçoit les honneurs du tabouret, ce qui l’assimile aux plus grandes dames ; elle quitte son appartement pour descendre au rez-de-chaussée et aller occuper un des locaux réservés aux Princes du Sang, autre distinction qui contribuera bientôt à adoucir l’aigreur de ses rapports avec la Reine et Mesdames. Bref, le scandale perd de son acuité, bien que le public en ignore et persévère en son hostilité[1].

ii

À ce changement qu’elle déclarera plus tard avoir provoqué par dévouement au Roi et pour le bien de son État, Madame de Pompadour puise une infatigable ardeur à développer des facultés politiques que le souci de sa défense a laissées jusqu’à ce jour insoupçonnées à elle-même. Elle n’a montré quant à présent « aucun des grands vices qu’on découvre chez les femmes ambitieuses, mais bien toutes les petites misères et la légèreté de celles qu’enivrent leur figure et la prétendue supériorité de leur esprit » ; et, bonne par engouement, rancunière par situation, la voilà qui s’applique tout à coup à placer ses

  1. M. P. de Nolhac.