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Page:Revue de l'histoire de Versailles et de Seine-et-Oise, année 1919.djvu/318

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augusta holmès.

limpide éclat de rire. » (Vrai rire d’enfant, me suis-je laissé dire, et qui faisait contraste avec ses olympiennes attitues.)

« Comment trouves-tu ma ménagerie ? » disait-elle à une amie (c’est de nouveau Mira Strany qui parle), en l’entraînant vers le piano.

Comme celle-ci s’émerveillait de sa dextérité à manier ces amours-propres irritables et ces imaginations ardentes : « Ma chère, reprit-elle, en rejetant ses cheveux en arrière avec un geste tout viril, tu sais la méthode employée par les dompteurs de bêtes sauvages ; ils regardent toujours leurs animaux droit dans les yeux. Je fais de même et ne perds jamais mon sang-froid. »

Ailleurs, Theuriet prête à Mira Strany ce propos qu’il recueillit vraisemblablement sur les lèvres mêmes d’Augusta :

« Les hommes veulent être asservis. Plus on leur appuie le pied sur le front et plus ils nous adorent. Je n’aimerai jamais qu’un homme illustre devant qui le monde se courbera et qui s’agenouillera devant moi seule. »

Céda-t-elle à l’une de ces surprises dont les plus forts ne sont pas à l’abri, ou trouva-t-elle réellement dans le poète qui devait l’asservir l’être prestigieux qu’elle avait rêvé ? Le fait est qu’environ à cette époque, Catulle Mendès entra dans sa vie.

Où l’a-t-elle exactement connu ? Les occasions de le rencontrer ne manquèrent pas. Dès l’origine, il fut comme elle un enthousiaste et, par la plume, en France, un révélateur de Wagner. Il était un des fervents auditeurs des concerts Pasdeloup, où fréquentaient assidûment, le dimanche, M. et Mlle Holmès. « C’est là, rapporte Clairin, que la pauvre Augusta fit la connaissance du fils d’Apollon qui devait la rendre si malheureuse. »

Ce pourrait avoir été aussi bien dans le salon du vieux poète Émile Deschamps, où se réunissait, vers 1865, cette société versaillaise de la fin du second Empire que M. H. Girard a entrepris de faire revivre. Chez Émile Deschamps fréquentaient maints poètes et maints musiciens. Très mélomane lui-même, il avait écrit plusieurs livrets d’opéra. Dans le petit pavillon du boulevard de la Reine où il terminait paisiblement ses jours, on faisait beaucoup de musique. La jeune Augusta y brillait du double éclat de ses grâces et de ses talents. Elle avait grandi