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Ainsi, pour en arriver là, ces savants ont été obligés de supposer qu’un refroidissement du pays, provoqué par Ahriman, a dès lors chassé les Aryas de leur première pairie, a forcé dès cette époque la totalité du peuple arya d’émigrer dans un climat plus doux. Or l’avènement de la période glaciaire pourrait seule expliquer un tel fait, car on ne connaît aucune autre cause capable de rendre inhabitable, à cause du froid, une contrée qui est représentée comme ayant été à l’origine un pays d’excellente nature. On serait donc obligé d’en inférer que les Eraniens avestiques avaient conservé, non seulement le souvenir de la période glaciaire, mais aussi celui des beaux jours qui l’ont précédée, et c’est ce qu’en général on n’admettra pas facilement. L’âge d’or primitif admis chez tant de nations n’est pas un souvenir traditionnel des temps préglaciaires ; c’est un produit d’une utilité très-contestable, créé par l’imagination d’une catégorie d’hommes qui s’est toujours beaucoup plus préoccupée de parer le passé d’ornements étrangers que de travailler à l’amélioration du présent et de l’avenir, et dont l’espèce ne parait malheureusement pas sur le point de s’éteindre.

Ajoutons que si les créations hostiles d’Ahriman avaient dû avoir pour conséquence de faire abandonner les lieux de séjour créés par Ormuzd, les hommes auraient été forcés d’abandonner toute la surface de la terre, puisque Ahriman oppose partout création à création, non seulement à l’égard des provinces éraniennes, mais aussi à l’égard de la terre anàryenne, c’est-à-dire de tout le reste du globe, comme on peut le constater au 4e verset du premier chapitre du Vendidad. Aussi la supposition d’une véritable émigration des Éraniens pré-avestique est-elle en