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Page:Revue de métaphysique et de morale, 1896.djvu/286

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REVUE DE MÉTAPHYSIQUE ET DE MORALE.

que ce n’est déjà plus vrai du tout pour les liquides. Les mêmes considérations s’offriraient pour la tentative de constituer un coefficient de chaleur spécifique à chaque substance. La notion du degré, telle que le physicien l’a créée, n’est pas nécessairement liée aux phénomènes naturels par quelque rapport absolu. Et ainsi toutes les fois que la température thermométrique entrera dans l’énoncé d’une loi physique, nous nous rappellerons que la forme de cette loi est due en partie à une création du savant, et que la forme eût été différente avec d’autres conventions pour la mesure de la température. — Que l’eau, par exemple, soit substituée au mercure la dilatation des solides qui était exprimée, au moins entre certaines limites, par la formule simple , sera donnée maintenant par une formule différente . Il n’y a rien ici de comparable à ce qui se passerait si, après avoir mesuré les longueurs avec le mètre, on avait envie de prendre le demi-mètre pour unité ; toutes les mesures seraient changées (elles seraient doublées), mais la forme d’une relation portant sur des longueurs ne serait pas altérée deux longueurs, dont l’une, par exemple, était trouvée d’abord triple de l’autre, continueraient à se montrer dans le même rapport. Au contraire, deux températures qui étaient l’une double de l’autre n’ont plus le même rapport quand le thermomètre à eau remplace le thermomètre à mercure.

Ainsi nous voyons déjà s’introduire, dans la loi étudiée, des éléments construits par l’esprit du savant, et se distinguant du donné de la façon la plus nette par leur caractère contingent et libre. Il y a là comme un second degré de subjectivité pour les choses sur lesquelles portent les lois de la science théorique. Le premier degré répondait à ce fait que toute science ne vise à expliquer, à connaître que des phénomènes ; au second degré, dont nous parlons, la science substitue aux phénomènes donnés eux-mêmes des éléments que dans une certaine mesure l’esprit construit librement.

TROISIÈME EXEMPLE

« Chaque planète décrit une ellipse dont le soleil occupe un foyer, et l’aire décrite par le rayon vecteur est proportionnelle au temps. »

Qu’est-ce d’abord que cette trajectoire elliptique dont il est question ? L’ellipse est une des lignes qu’ont définies et étudiées jadis les géomètres grecs. Leur tournure d’esprit les portait trop à associer le réel à l’idéal, à faire reposer toutes leurs conceptions sur un fond