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J. LAGNEAU.FRAGMENTS.

La vraie liberté, c’est la production de la nature par l’esprit c’est-à-dire surtout par l’amour.

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Preuve morale absolue : Dieu posé à la suite de la réflexion.

L’existence n’est qu’un des trois modes de la réalité existence, être, valeur.

1. – L’existence ne saurait être attribuée à Dieu, car exister c’est être senti, mais l’existence n’est pas donnée par la sensation, elle suppose être entendue, c’est-à-dire être aperçue nécessaire ; autrement dit exister suppose être, suppose l’essence, et le réel de l’existence, du contingent, c’est l’essence, c’est le nécessaire ; mais peut-il être jamais saisi absolument dans le donné sensible ? Non. De là la nécessité qu’il y soit affirmé a priori, c’est-à-dire que l’essence, le nécessaire constitue un ordre à part de réalité. Est-ce celle de Dieu ? (Il n’est pas possible de passer de l’existence à l’essence).

2. – Dieu est-il, c’est-à-dire a-t-il l’être de l’essence, du nécessaire ? Mais il n’est pas non plus absolu, car il est l’abstrait, ou pour mieux dire, le formel, et, 1o toute forme n’a de réalité que par une matière (donc relative) ; 2o elle n’est pas donnée nécessaire, ne détermine pas réellement l’esprit. Descartes le reconnaît pour les vérités finies, qui n’entraînent pas l’existence, dit-il, mais, suivant lui, il y en a une seule, l’infinie, qui pose l’existence, posant la nécessité absolue (l’argument ontologique consiste à faire sortir la nécessité de l’infinité, c’est-à-dire de la pure forme de la pensée. Suivant Descartes, la pensée ici serait déterminée absolument).

3. – Le divin dans l’univers, c’est sa valeur, c’est-à-dire son rapport à la liberté. C’est la troisième réalité, principe des deux autres. Rien n’est en définitive que ce que l’esprit veut.

La première expression de Dieu c’est la liberté ; mais la nécessité est inséparable de la liberté, qui la suppose nécessairement, et celle-ci à son tour n’est qu’un rapport qui suppose des termes, dont il est la vérité. Dieu est la liberté ; mais cette liberté n’est pas l’absolu, non plus qu’il n’est l’être ou la nature, puisque ces termes, sont relatifs l’un à l’autre, c’est-à-dire que la nécessité est leur lien commun ; ils ne sont donc que pour l’entendement, c’est-à-dire pour la pensée analytique.

Fera-t-on de cette nécessité et de cette nature le produit de la