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Page:Revue de métaphysique et de morale, 1898.djvu/560

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E. CHARTIER.COMMENTAIRE AUX FRAGMENTS DE J. LAGNEAU.

même objet peut être généralisé et appliqué à une seule de ses images. Car les cinq sens ne sont rien autre chose que des parties du corps qui sentent d’une manière différente ; or les parties d’un même sens, comme les éléments de la rétine ou les corpuscules du tact, sont aussi des parties du corps qui sentent de manières différentes. Le problème de la liaison des parties d’une image entre elles est donc analogue au problème de la liaison des différentes images d’un même objet ; et l’on voit par là que notre analyse pourrait se poursuivre indéfiniment, la sensation ou le donné n’étant jamais qu’une idée directrice, une abstraction.

En second lieu, que l’on veuille bien remarquer que l’unité de l’objet, et, par suite, les propriétés de l’espace, ne sont pas, par la méthode d’analyse réflexive, constatées comme des faits, mais comprises comme des nécessités. Il est impossible alors de ne pas leur accorder une valeur objective, indépendante de notre pensée individuelle, puisque vérité, objectivité, nécessité, éternité, sont une seule et même chose. Par exemple, que l’on veuille bien comprendre que, lorsque nous parlons du corps humain et de ses mouvements nous ne désignons point par là le corps fortuit, qui existe en fait, que l’on constate, mais le corps nécessaire, ainsi qu’il a été expliqué dans le commentaire du fragment 16. Cette seconde remarque explique suffisamment le fragment 43.

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Le temps marque de… L’espace et le temps ne sont pas séparés dans la connaissance instinctive (V. fr. 18). L’analyse réflexive seule est capable de les distinguer, sans rompre leur union intime, en recherchant quelles sont leurs conditions nécessaires. L’étendue, ainsi qu’il a été expliqué, suppose la conception d’une loi nécessaire suivant laquelle nous pouvons passer de certaines sensations à certaines autres ; l’étendue n’est donc pour moi que la représentation des effets possibles de mes mouvements ; connaître l’étendue, c’est se souvenir et prévoir ; ce que nous appelons une image n’est qu’une anticipation de ce qui va être éprouvé, et des intermédiaires qui nous en séparent. Connaître les choses dans l’étendue c’est donc être maître de ses sensations ; ou, si l’on veut, en tant qu’elles sont considérées comme possibles pour nous, les choses sont dans l’étendue. Mais elles sont aussi dans le Temps ; cela ne veut point dire que les images des choses soient rangées ailleurs dans un