Page:Revue de métaphysique et de morale - 1.djvu/287

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

précédents, les « sciences » ne sont que des parties d’une psychologie, c’est-à-dire d’un tableau des états de conscience par lesquels passe ou peut théoriquement passer le moi ; en d’autres termes, le tableau des lois qui président actuellement ou pourront présider un jour à la formation des associations qui constituent la vie représentative. Nous ajouterons, quitte à développer plus tard ce point, que, du point de vue où nous nous plaçons maintenant, la science apparaît, en tant que science même, comme une morale puisque la seule fin de la connaissance dite scientifique et objective est le bien-être intellectuel résultant d’une ataraxie à l’égard des influences perturbatrices des apparences diverses et contradictoires. En complétant par cette donnée notre définition de la science qui est ainsi rétablie, mais avec un autre rôle, nous dirons : La science, en général, est le tableau des lois que doit suivre l’esprit dans la formation de ses associations, s’il veut trouver son propre bien-être qui consiste dans la fixation d’un équilibre des idées.

Ainsi la science elle-même est le remède au mal que fit le désir de la science. Comme nous l’avons exposé dans le premier chapitre, la première erreur de la pensée fut la position d’un objet (interne ou externe) autre qu’elle-même. De cette position d’un objet, de cette création de la représentation, interne ou externe, résulta inévitablement la multiplicité des représentations, multiplicité qui, tout aussi nécessairement, s’accompagna d’un conflit. L’être pensant, ou ce que la nécessité du langage nous fait nommer ainsi, sentit alors la souffrance intellectuelle jusqu’alors inconnue et il rechercha ce qu’il nomma la vérité dont l’idée apparaît alors pour la première fois et qui n’est en soi autre chose que le moyen de mettre fin à son malaise, à sa souffrance, De là ce travail acharné que l’homme poursuit de siècle en siècle afin de connaître, c’est-à-dire afin d’arriver à la science totale et immuable qui sera la réparation de la faute première de la pensée, la position d’un objet. Ce sera la réparation en ce sens que l’esprit aura supprimé la souffrance, résultat de la faute. Et cette souffrance, il l’aura supprimée, il l’aura rachetée au prix d’une souffrance prolongée depuis des siècles.

III
qu’est-ce que la véritable science ?

Nous croyons avoir montré que ni la connaissance dite objective,