Page:Revue de métaphysique et de morale - 1.djvu/438

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les constituent, les multiplicités de simultanéité, sont eux-mêmes relatifs, et, d’autre part, elles sont relatives simplement comme multiplicités de succession. D’ailleurs, ce qui est vrai de l’espace est aussi vrai du temps, ordre de succession des phénomènes physiques ; le concept de série totale des événements est, comme le concept d’univers, un concept limite, car un événement de la série n’est vraiment élémentaire que si on le suppose tel, et la multiplicité totale de succession est, aussi bien que la multiplicité totale de simultanéité, absolument inconcevable.

En résumé, les notions que nous formons touchant les phénomènes du monde physique sont entièrement relatives. Ces phénomènes sont non seulement essentiellement relatifs par rapport au sujet pensant, mais aussi formellement relatifs, les uns par rapport aux autres, étant invariablement soumis à la catégorie de quantité.

Or le concept historique fait abstraction de cette relativité formelle. Nous posons à part, nous isolons, nous individualisons en quelque sorte, par les noms d’univers et d’agrégat, les multiplicités dont nous étudions l’histoire, et nous parlons de l’univers, du cosmos, comme si quelque chose d’actuellement réalisé correspondait à ce concept et des éléments comme s’ils étaient réellement élémentaires et simples. Ce sont là des conventions, des attitudes préalables de l’esprit qui permettent de raisonner sur des termes de rapports comme si c’étaient des absolus. Ce sont des formes variées d’une même hypothèse, l’hypothèse de la non-relativité dans la catégorie de quantité ; hypothèse métaphysique, car elle ne découle point de la simple observation ou constatation empirique, mais provient du besoin d’interpréter l’expérience, qui est la raison d’être de toute métaphysique. Est-ce à dire que cette hypothèse, parce qu’elle revêt le caractère métaphysique, est sans valeur ? Nullement, elle persiste, encore aujourd’hui, dans certaines branches de la science : elle n’est, partant, pas inutile, et elle a été autrefois indispensable. Mais ce qu’il importe de noter c’est que l’analyse des opérations de la connaissance montre qu’elle n’en fait point partie nécessairement, qu’elle n’est pas a priori, puisque, de nos jours, on observe et on étudie certains groupes physiques — avec une connaissance relativement avancée des lois qui les régissent — sans faire le moindre usage, ou, tout au plus, un usage purement transitoire, des notions de tout, d’agrégat, d’espèce et d’élément simple.

D’ailleurs, ce n’est pas la seule hypothèse qui se trouve implicite-