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NOUVEAU PROPHÈTE EN AFRIQUE.

coïncide avec celle d’une révolution par suite de laquelle le mahométisme, déjà introduit depuis long-temps parmi ces peuples, devint exclusivement la religion de l’état. Depuis cette époque aussi, la couronne n’est dévolue au prince que par l’élection du conseil des Imâms, pontifes religieux et chefs politiques des provinces et des districts. Ce conseil tient ses assemblées à Kélogn, capitale de tout l’empire. Le caprice, l’intrigue, l’esprit de parti, ne président que trop souvent à de tels choix ; aussi les dépositions, les mutations fréquentes, sont-elles la suite naturelle de cet ordre de choses.

Il y a dix ans, l’émyr-âl-moumenyn Yousef ben Siry fut déposé. Après quelques mois d’anarchie, l’émyr Ibrahym obtint le sceptre ; mais il fut bientôt déposé lui-même. Une nouvelle lutte s’engagea, dans laquelle le parti de l’émyr Yousef eut le dessus, et depuis lors il régna sans partage, malgré les menées sourdes ou les tentatives ouvertes de son compétiteur Ibrahym, moins puissant et moins redouté que lui. C’est au milieu de ce conflit mal éteint de prétentions et de droits, au sein d’une nation où la ferveur religieuse conserve encore une partie de son enthousiasme (surtout dans la province de Toro), qu’est venu se montrer le nouveau Mahdy.

Mohhammed ben A’mar ben Ahhmèd est né vers 1803, à Souymah, grand village de la province de Toro, dans le voisinage de la ville de Podor, où la compagnie française d’Afrique avait autrefois un poste fortifié. Il montra de bonne heure cette ardeur des études théologiques qui distingue en général les habitans du Toro ; il fut un des jeunes thâlebs les plus distingués d’entre les disciples d’Al-hhasan, chef du village de Maou, et d’Abou-baker, imâm du district de Dimar, le plus puissant, le plus influent de ceux du Toro, qui fait sa résidence à Galmag, sur le Sénégal, à quelque distance au-dessus de notre poste de Daghanah. De ces écoles, Mohhammed passa, en 1819, âgé alors d’environ seize ans, à celle des Marabouths, les plus renommés d’entre ceux des tribus maures qui errent dans le