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TRAITÉ DE PAIX D’ANDRINOPLE.

Bessarabie, la Crimée et les côtes de la mer d’Azof. Si la Russie eût gardé ces provinces, elle aurait excité la défiance des cabinets européens bien plus disposés à contester son accroissement en Europe qu’en Asie. La mesure la plus sage était de se retirer, dans un moment où il n’y avait que des maux à réparer, des secours à administrer. Mais les conquérans ont su conserver les moyens de rentrer en temps opportun, en faisant détruire les forteresses de la rive gauche du Danube et en empêchant les Mahométans de s’y établir. De cette sorte, les provinces seront gouvernées d’après les vues de la Russie, puisque l’ambassadeur de S. M. I. a sur elles le droit de protection, et que l’hospodar nommé à vie, ne craignant plus le contrôle de la Porte, qui n’a pas le droit de s’ingérer dans l’administration, devra être dévoué à la Russie et se bornera à payer à Sa Hautesse un modique tribut.

Art. iv. Frontières nouvelles de la Turquie d’Asie. Cet article est, de tous, le plus important, et celui qui devait exciter de vives discussions. Il y est dit que la Géorgie, l’Imirétie, la Mingrélie, le Guriel, et d’autres provinces du Caucase, ont été unis à perpétuité à l’empire de Russie ; et l’on se fonde sur cette assertion pour étendre les frontières de cette partie de son territoire. Or, il nous est impossible de ne pas nous récrier contre de pareils antécédens, qui ne tendent à rien moins qu’à légitimer toutes les usurpations. Commençons par la Géorgie. Le dernier roi de ce pays, czar Héraclius, prince chéri de ses sujets, réclame l’appui de l’impératrice Catherine pour se défendre contre les Persans ; un traité est fait entre les deux souverains ; mais bientôt les Russes se retirent, laissent Tiflis sans défense, et cette ville est saccagée par l’eunuque Aga-Mehemmed-Khan, chef de la dynastie actuellement régnante en Perse. Cependant l’infortuné Héraclius, loin de décliner la protection de ses alliés, se défend courageusement. Pour récompense de sa fidélité, on l’oblige à signer une abdication en faveur de l’autocrate russe. Sa famille, privée