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LES ALBANAIS EN ITALIE.

L’épouse trouva les amis de la famille au seuil de sa nouvelle demeure. Ils lui souhaitèrent la bienvenue en chantant en chœur un refrain albanais, dont voici le sens. « Sois la bienvenue, ô jeune épouse ! tu es sous le toit de l’époux, comme le vin et le sel sur la table du festin, comme le soleil levant au milieu de ses rayons. »

L’évêque me combla d’honnêtetés ; le voyageur anglais, dont j’ai parlé plus haut, ayant été son hôte, monseigneur était désolé que je ne fusse pas aussi le sien. En le quittant, j’entrai dans la cathédrale nue et sombre ; elle était remplie de fidèles des deux sexes, et j’eus là l’occasion d’étudier le costume des femmes. Il s’est beaucoup italianisé pour la forme, mais les couleurs tranchantes étant du goût des Calabraises autant que des Albanaises, il n’a, sous ce rapport, subi aucune modification. Ce que celles-ci ont gardé de leurs mères, c’est le flammeum, ou voile écarlate bordé de bleu ou de jaune, et le corset vert, brodé en or. Elles l’appellent vulgarida, du nom d’un oiseau dont il a la forme. Il est fort grâcieux, et comme les femmes sont toutes bien faites, il leur sied à ravir.

Femmes et hommes, à genoux et séparés, chantaient en grec, d’abord alternativement, puis en chœur, la bénédiction du soir. Cette cérémonie rustique avait je ne sais quoi de simple et d’antique qui m’allait au cœur ; debout contre un pilastre, je la contemplai long-temps en silence.

Le costume éclatant et pittoresque des femmes contrastait avec l’obscurité du temple. Un dernier rayon de soleil couchant y pénétrait, et tombait sur le visage d’une jeune Albanaise à genoux à l’autel. Cette belle