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départemens nous envoient n’ont d’enthousiasme et d’applaudissemens que pour les projets d’utilité réelle et saisissable. Un pont suspendu, un chemin de fer, un marché, une fontaine ou un égout, voilà ce qu’ils approuvent hautement, ce qu’ils demandent avant tout.

Il importe donc que l’administration, plus éclairée que les chambres, supplée à leur ignorance, et corrige par une volonté sage, mais énergique, l’impéritie de ses avis. Qu’est-ce que quatre-vingt mille francs quand il s’agit d’un chef-d’œuvre ? a-t-on redemandé les douze millions qui devaient faire retour à l’état après le vote de la liste civile ?

Si une fois on laissait les chambres s’immiscer dans l’exécution de pareils travaux, il faudrait bientôt traiter les sculpteurs et les peintres comme l’armée de la Loire, et les licencier ; car on aurait tort d’espérer que les orateurs du Palais-Bourbon arrivent prochainement à deviner qu’il y a autre chose dans la vie et la gloire d’une nation que le gain d’une bataille, l’établissement d’une usine ou la signature d’un traité de commerce ; que les peuples civilisés ont besoin de monumens tout aussi bien que de sel gemme ou de charbon de terre.

Et ce que je dis des monumens, je le dirai volontiers de la science, car, à supposer que la proposition de M. Arago eût été faite par M. Berryer, comme elle pouvait l’être, la chambre n’eût pas senti sa vanité intéressée à voter d’entraînement les constructions de l’Observatoire. Sans la présence de l’illustre astronome, elle n’eût pas rougi de traiter les constellations comme elle a traité l’histoire naturelle.


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